Accueil ou retour des migrants : la Belgique, un accueil de transit ?
L’émergence de cette nouvelle orientation politique de limitation à l’accès du territoire est pour la première fois abordée lors du sommet européen de Tampere du 15 au 16 octobre 1997. Deux approches y sont mises en avant : la lutte contre l’immigration clandestine et celle contre la criminalité internationale. Elles vont se traduire par une série de mesures communes visant à uniformiser les politiques en la matière sur l’ensemble du territoire.
Selon Abdel El Abbassi, attaché études et politique à Fedasil: « Dans un domaine plus juridique, il existe au niveau européen des directives en matière d’asile et de migration auxquelles les Etats membres doivent se conformer. Ainsi, en ce qui concerne l’accueil des demandeurs d’asile, il y a une Directive Accueil qui date de 2003 et qui récemment, en 2013, a été modifiée (« Directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale »).
Cette politique migratoire européenne devient donc le dénominateur commun des politiques nationales. Les Etats conservent ainsi le pouvoir de contrôler l’accès à leur territoire tout en appliquant les réglementations européennes en matière d’asile. Une grande majorité des Etats ne respectent pas les directives générales fixées.
Quelques tournants marquants de l’année 2013
Toujours selon monsieur Abdel El Abbassi, « Il y a eu des évolutions importantes au cours de la dernière décennie. Les plus marquantes à mon avis, et en ce qui concerne l’accueil des demandeurs d’asile, ont été bien sûr l’adoption de la loi accueil en 2007 et plus tard, suite à la crise de l’accueil, les modifications législatives apportées en 2011 et 2012 à la loi accueil dans divers domaines (possibilité de restreindre l’aide matérielle en cas de demandes d’asile multiples, intégration du concept de trajet de retour, question des demandeurs d’asile exerçant une activité professionnelle, etc.). »
Politique de regroupement familial plus restrictive, accès à la nationalité belge plus difficile, procédure d’asile plus rapide et expéditive pour les pays dit « sûrs »[5], quasi disparition des régularisations humanitaires et médicales…, les politiques migratoire et d’asile ont connu une évolution importante.
Contrôler les flux migratoires a été une des priorités en début de législature de l’ancienne ministre et secrétaire d’état à l’immigration Maggie De Block (Open VLD). Elle instaure alors une démarche de contrôle plus importante, limitant le nombre de demandes d’asile avec une politique très stricte et laborieuse dissuadant beaucoup de s’aventurer dans une démarche aussi complexe. Effectivement, les demandes sont en baisse en 2012 et 2013. Les refus, quant à eux, sont en augmentation d’après le CGRA[6] ! Ce qui en résulte questionne néanmoins les fondements de la politique belge d’accueil. En effet, la question qui se pose est la suivante : la Belgique se ferme-t-elle aux demandeurs d’asile?
Sur 19.731 décisions prises en 2012 par le CGRA, seuls 15% d’entre elles étaient positives. En comparaison à d’autres années, les années 2012 et 2013 montrent une tendance descendante des demandes inscrites par le CGRA, passant de 42.600 dossiers en 2000 à 25.500 en 2011 pour atteindre en 2013, 15.840 demandes d’asile. Ce qui montre une diminution de 26,2% par rapport à l’année précédente. En Belgique, cette évolution est à la baisse alors que dans beaucoup d’autres pays européens, le nombre de demandes d’asile est, au contraire, en hausse!
Selon le rapport d’activités de Fedasil, l’année 2013 a été une année de réorganisation du réseau d’accueil pour les demandeurs d’asile. Un centre d’accueil a été fermé : « Cette décision s’explique par le contexte budgétaire fédéral qui impose des économies et la baisse des demandes d’asile qui entraîne une diminution constante de l’occupation dans le réseau d’accueil. »
Au CIRE, on n’hésite pas à dire que pour les Afghans « il y a des dysfonctionnements… Politiquement, Maggie De Block pourrait faire des choses, mais ne les fait pas. L’ordre de quitter le territoire après un décision du CGRA est appliqué de manière automatique sans étudier le risque encouru pour l’Afghan qui retourne dans son pays ». Pour le CIRE, la Secrétaire d’Etat « se cache derrière son administration. »
Ces dernières années n’ont pas été de tout repos concernant la politique en matière d’asile et de migration. La proposition du nouvel accord de gouvernement poursuit cette évolution tout en apportant des modifications significatives aux politiques menées jusqu’ici.