Charline Brodzki

Après l’IPPJ, combler le vide

Le service d’Accompagnement Post-Institutionnel (API), est un service qui aide le jeune à se réinsérer dans la société après avoir passé un séjour en IPPJ.

 « Ce sont des jeunes qui ont été meurtris par la vie et souvent qui ont des familles très carencées. » nous livre Françoise Wilket, éducatrice à l’IPPJ de Fraipont. Elle parle ici des jeunes qui ont commis des faits qualifiés infraction, des jeunes considérés comme « délinquants » et pour qui le juge a décidé qu’ils séjourneraient dans une institution publique de protection de la jeunesse, une IPPJ. « On travaille avec eux pendant longtemps, ce qui nous permet de créer un lien, ajoute Françoise Wilket. Et c’est grâce à ce lien qu’on arrive à débloquer des choses chez ces jeunes. On essaye le plus régulièrement possible qu’ils ne soient pas seuls en sortant. Parce que c’est souvent difficile pour eux et même pour leurs familles. »

En 2016, en Wallonie et à Bruxelles, on comptait 1647 jeunes en Institutions Publiques de Protection de la Jeunesse (IPPJ) et seuls 248 d’entre eux ont bénéficié d’un service d’Accompagnement Post-Institutionnel (API)[1]. A l’âge où ces jeunes sont censés être sur les bancs de l’école, ils doivent suivre des « mesures » imposées par la loi belge pour avoir commis un délit grave. L’objectif d’un placement en régime ouvert d’IPPJ (pour les jeunes de 12 à 18 ans) ou en régime fermé (de 14 à 18 ans) est de faire réfléchir le jeune à l’acte qu’il a commis.  Mais comment se passe la réinsertion du jeune en société après un séjour en IPPJ ?

Un service post-institutionnel

Le service d’accompagnement post-institutionnel (API), comme celui de Fraipont, est un service qui aide le jeune à se réinsérer dans la société après avoir passé un séjour en IPPJ. L’une des conditions de sortie est que le jeune ait élaboré un ‘’projet de vie’’, c’est-à-dire qu’il ait une scolarité, une formation, un patron et au moins un point de chute familial. Ensuite, l’équipe API, constituée d’éducateurs et de psychologues, est chargée de comprendre l’histoire particulière de chaque jeune et s’efforce de trouver des solutions. L’objectif premier de l’API est d’accompagner le jeune dans sa vie quotidienne et de recréer un lien familial stable. Une fois que le projet de vie est rédigé, la mission de l’API consiste à encadrer le jeune à l’extérieur de façon intensive. Il s’agit de veiller à la stabilité du jeune, et de mettre en place un réseau de relations sociales positives.

Les services API n’accompagnent généralement que des jeunes qui ont été placés dans des sections de placements longs (de trois mois minimum allant jusqu’à deux ans). Pour les placements courts, c’est très rare qu’une équipe API prenne le jeune en charge.

Ce sont encore des enfants

Comme nous l’explique Jacques Fierens (avocat au barreau de Bruxelles et professeur à l’université catholique de Louvain, de Namur et de Liège), la préparation à la sortie n’est pas la même en IPPJ qu’en prison. Madame Wilket nous précise que l’enfant est très suivi en IPPJ.

Dans les centres ouverts, il n’y a que le soir où ils sont enfermés à clé dans leur chambre. La journée, les éducateurs les occupent en faisant des activités et les jeunes peuvent circuler dans le centre. Les éducateurs d’IPPJ cherchent à responsabiliser le jeune en l’obligeant à respecter les règles.

Un séjour en IPPJ peut avoir des conséquences à très long terme.

Un séjour en IPPJ peut avoir des conséquences à très long terme. Les parents sont parfois discrédités et le placement va nourrir un antagonisme entre le jeune et ses parents. C’est pourquoi la mission première de l’API est de permettre au jeune de retourner vivre dans un environnement stable. L’éducateur API essaye de se rendre disponible. Pour cela, il dispose d’un téléphone de fonction que le jeune peut appeler quand il le souhaite pour toute question éventuelle. Lors de conflits entre parents et enfants, ceux-ci peuvent également contacter l’éducateur pour trouver des solutions.

Création d’une relation

La grande caractéristique du travail d’accompagnement c’est la relation. Pour aider le jeune à se réinsérer en société, l’éducateur doit obtenir la confiance de celui-ci et créer une relation positive. L’éducateur API représente l’autorité, il doit contrôler le jeune en rendant un rapport au juge de la jeunesse toutes les six semaines, tout en devant soutenir le jeune dans ses projets. « Il faut vraiment apprendre à connaître le jeune et sans réticence, quelle que soit son origine, quelle que soit sa situation sociale surtout. Et à partir de là on peut commencer à travailler et une fois qu’on est en relation avec un jeune, qu’on a réussi à construire cette relation alors on peut induire d’autres choses », nous explique Patrice Mathonet, éducateur API à l’IPPJ de Fraipont.

L’API, est-ce suffisant ? Le service d’accompagnement post-institutionnel (A.P.I.) est nécessaire, car il y a souvent un vide après l’IPPJ qui peut pousser à la récidive. Ce service aide le jeune et sa famille à satisfaire les exigences fixées par le juge. Il permet également d’éviter une rupture trop importante entre l’IPPJ, où tout y est très rythmé, et le milieu familial souvent démuni d’organisation. Les services API et d’autres services d’accompagnement de l’Aide à la jeunesse, comme les Samio (services d’accompagnement, de mobilisation intensifs et d’orientation), vont fusionner en un nouveau type de services : les « équipes mobiles d’accompagnement ».
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