Discriminations à bas bruit : enquêtes dans les replis des politiques
De futurs travailleurs sociaux démontent les évidences des politiques publiques. Ils décryptent des discriminations – en matière de logement, d’enseignement, d’emploi… – qui ont la particularité d’être provoquées par les politiques publiques, amplifiées par elles ou non résolues malgré elles.
Proposer à des travailleurs sociaux de démonter des évidences des politiques publiques, voilà bien une démarche qui ouvre les yeux. À l’heure où l’on fait le bilan des législatures, Thomas Lemaigre et Edgar Szoc, anciens collaborateurs d’Alter Échos, chargés d’un cours sur les enjeux des politiques publiques en 1remaster en ingénierie et action sociales à l’IESSID (la catégorie sociale de la Haute École Bruxelles-Brabant), ont proposé à leurs étudiants d’analyser des discriminations à l’œuvre dans les politiques publiques.
Les étudiants, futurs professionnels du social ou travailleurs sociaux en reprise d’études, ont décliné plusieurs sujets, des dossiers bien connus analysés sous des angles qui le sont moins, mais aussi des problématiques qui passent habituellement sous les radars. On découvrira par exemple une analyse de la prise en charge dans l’enseignement des enfants autistes.Depuis le «Plan transversal Autisme» proposé en 2016 par les politiques en Région de Bruxelles-Capitale et en Région wallonne, les auteurs de l’article constatent que «peu de promesses ont été tenues». «Il y a bien eu un apport financier mais pour le moment rien n’a été dépensé. Il y a des promesses, des engagements, mais il n’y a pas de budgets définis, le grand reproche que l’on fait au Plan transversal Autisme est que ce plan n’est pas budgété, il n’y a pas de programmation, il n’y a pas d’échéancier, il n’y a pas d’évaluation, rien de tout ça», déplore Cinzia Agoni, du Groupe d’action qui dénonce le manque de places pour personnes handicapées de grande dépendance (GAMP).
Certes, les classes inclusives ont été mises sur pied mais elles sont surtout adaptées aux enfants porteurs d’autres handicaps.
Autre sujet traité: le logement social pour les personnes handicapées.Sans surprise, au vu de la situation dramatique du logement social à Bruxelles, «l’inclusion sociale par le biais du logement reste sous-exploitée par les pouvoirs publics. La tendance allant toujours vers le placement de ce public vers des structures spécialisées». Quand logement social il y a, encore faut-il qu’il soit adapté, et certains bailleurs sociaux considèrent qu’un ascenseur suffit pour répertorier le bien comme adapté. Or quand la personne refuse un logement «sans raison ou motivation valables», elle peut se faire radier.
Les étudiants ont aussi passé à la loupe le décret inscription, une procédure complexe qui peut s’avérer discriminatoire:«Comment font les parents pour en comprendre le fonctionnement et les enjeux, surtout si l’on prend en compte le fait qu’un certain nombre d’entre eux ne maîtrisent pas ou peu la langue française?»
Un article revient également sur la question du don de sang pour les personnes homosexuelles.Depuis l’été 2017, elles peuvent donner leur sang après 12 mois d’abstinence. «Une exclusion temporaire peut être normale – c’est le cas pour les personnes qui ont voyagé dans la partie subsaharienne de l’Afrique, pour qui le délai est de quatre mois. Mais pourquoi 12 mois pour les HSH (hommes qui ont des relations sexuelles avec d’autres hommes).» C’est la question que se propose d’analyser un autre groupe d’étudiants.