Trop jeunes pour travailler?
Fraîchement diplômés, de nombreux jeunes se lancent à la recherche de leur premier emploi. Souvent remplis d’espoir et d’attentes, ceux-ci se retrouveraient rapidement confrontés à des discriminations à l’embauche dû à leur âge et leur manque d’expérience.
En 2012, à l’occasion de l’année européenne du vieillissement actif et de la solidarité intergénérationnelle, le Centre pour l’Egalité des chances et la lutte contre le racisme constate : de nombreuses images toutes faites entourent la question de l’embauche chez les jeunes. Ils seraient perçus comme des travailleurs moins motivés, moins disciplinés et inexpérimentés.
En ce qui concerne le manque d’expérience, Pierre Ledecq, responsable nationale des jeunes CSC, remarque que « c’est un peu le serpent qui se mord la queue : les employeurs reprochent aux jeunes de manquer d’expérience, mais tant que le jeune n’est engagé nulle part, il ne peut avoir de l’expérience ».
Madame Virginie Thielmans est responsable des ressources humaines chez Seco, une entreprise de recrutements d’ingénieurs. Elle confie que le premier regard porté sur le CV du candidat s’attarde sur l’âge et l’expérience associée. Cependant, l’âge idéal dépend du profil recherché. Chez Seco, si l’employeur estime avoir le temps de former le jeune diplômé en interne, il le fera car un jeune est moins cher. A contrario, lorsque l’employeur ne dispose pas de ce temps, « engager quelqu’un formé auparavant est plus rentable pour une entreprise plutôt que de prendre un profil junior qu’il faudrait former ».
Les jeunes, mal préparés ?
Selon Virginie Thielmans, les jeunes ne sont pas prêts lorsqu’ils arrivent sur le marché du travail. Les écoles laisseraient quant à elles entendre aux étudiants que leur futur sera radieux : bons salaires, horaires,… etc. Une image faussée du marché de l’emploi qui pousserait les jeunes diplômés à avoir de grands espoirs quant à leurs futures conditions de travail.
Pourtant, la situation sur le marché du travail n’est pas brillante. Selon le Centre national du Travail, 39,9% des jeunes sont chômeurs à Bruxelles contre 33% en Wallonie. Ces chiffres sont interpelants et équivalents à ceux observés en Espagne ou en Italie. Pierre Ledecq s’alarme : « Les jeunes arrivent sur un marché du travail complexe où il y a peu d’offres d’emploi. Ce qui allonge leur durée sans emploi et donc sans expérience. »
Toujours selon le syndicaliste, les politiques mises en œuvre contribueraient au problème de l’emploi chez les jeunes. En effet, elles mettent en place des plans d’embauche pour faciliter l’emploi chez les jeunes. Mais selon Pierre Ledecq, cela bloque l’embauche elle-même : certains employeurs « jettent » les jeunes n’entrant pas dans les conditions d’un plan (les « trop » formés ou les « pas assez » chômeurs, par exemple). Le syndicaliste dénonce également la fausse idée selon laquelle la solution au problème se trouve dans la formation. Selon lui, c’est reporter la responsabilité sur l’individu.
Anne-Sophie, diplômée en psychologie cherche du travail depuis plus d’un an. Selon elle, les conditions d’accès aux mesures gouvernementales bloqueraient l’accès à l’embauche. À titre d’exemple, il faut avoir minimum six mois de « stage de transition » au chômage pour pouvoir bénéficier de la mesure ACS. Anne-Sophie a fait une formation complémentaire, un stage d’insertion et cherche toujours un travail. Elle dénonce un marché saturé dans le domaine social et nous confie son impression d’être victime de discrimination.
Malgré ce problème de discrimination à l’embauche, selon le Centre pour l’Egalité des Chances et la lutte contre le racisme, il est complexe de mesurer le degré réel de discrimination. Toutes les personnes dans ce cas ne portent pas plainte. Il est de plus difficile de dire pour un cas rapporté combien ne sont pas signalés. Toujours selon le Centre pour l’Egalité des chances et la lutte contre le racisme, peu de gens avouent également avoir des préjugés ou des attitudes discriminatoires.